Approvisionnement en eau potable : Un bilan mi-figue mi-raisin | Nor Info

Approvisionnement en eau potable : Un bilan mi-figue mi-raisin

lun, 12/12/2022 - 23:22

La question de l’approvisionnement en eau potable de l’ensemble des localités du territoire national occupe une place centrale dans le programme du président de la République, « Taahoudati ». Seulement, 3 ans après le début d’exécution des projets dans ce domaine, on est encore assez loin du compte. Dans les grandes agglomérations urbaines comme Nouakchott, Nouadhibou, Kiffa…l’accès à l’eau demeure un casse-tête pour beaucoup de ménages et notamment dans les quartiers populaires. C’est ainsi qu’à Nouakchott, dans les Communes de Sebkha, Arafat, Riyad et d’El Mina, l’accès à l’eau potable reste encore problématique pour beaucoup de ménages vulnérables. Dans bon nombre des quartiers situés dans ces communes, le service d’eau potable est assuré par des charretiers qui transportent et vendent l’eau au volume (par bidon de 20L), une pratique ancestrale qui a encore pignon sur rue dans plusieurs zones en déficit chronique. Le même problème se pose dans la capitale économique, Nouadhibou où la pénurie de l’été 2022 était révélatrice avec des coupures répétées s’étalant sur une longue période, une situation qui devenait intenable pour les habitants. Ici, en temps normal, la tonne d’eau se négocie à 5000 MRO, des prix qui deviennent encore plus exorbitants en période de pénurie. La promesse du gouvernement de régler définitivement ce problème se fait toujours attendre. Et pour ce faire le projet de dessalement de l’eau de mer semble être la solution la plus appropriée. En attendant, la ville continue d’être approvisionnée depuis les années 50 à partir de la nappe de Boulenouar, située à 80 kilomètres de distance.

Lancement d’une série de projets

Plusieurs projets ont été programmés dès l’été 2019. C’est ainsi que dans le cadre du Programme d’Investissements Prioritaires (PIP) pour le compte des pas du G5 Sahel les régions des deux Hodhs ont bénéficié de la mise en œuvre de projets d’accès à l’eau et l’assainissement. Les populations de ces zones font l’objet d’une attention particulière en matière d’investissement en infrastructures. En Mauritanie, cet appui a ciblé notamment la réalisation d’ouvrages d’alimentation en eau potable dans ces deux Wilayas. 12 millions d’euros ont ainsi été alloués par l’Agence française pour le développement (AFD) afin de réaliser ces projets. Cette intervention devrait bénéficier à près de 60 000 personnes résidant dans 74 localités de plus de 500 habitants. Elle s’échelonne entre 2019 et 2023. En juin 2022, le gouvernement a lancé un projet d’alimentation en eau potable de plusieurs villes avec une enveloppe de 55 millions de dollars. En effet, dans le cadre de la mise en œuvre de son programme prioritaire élargi, la Mauritanie mène une vaste initiative visant à améliorer les conditions de vie des populations. Un programme dont l’eau et l’assainissement constitue un axe majeur. Ce projet permettra la construction de 85 km de canalisation, d’une station de pompage, de 35 km de lignes électriques et de 3 réservoirs. L’adduction en eau se fera dans les villes de Digueni et Weinatt Zbel à partir du lac Dhar. Notons que le gouvernement a déjà réalisé 107 infrastructures d’assainissement au niveau de la wilaya du Hodh Echarghi au profit de certaines écoles et de postes de santé. Le financement du projet est accompagné par le Fonds arabe pour le développement économique et social (FADES). Par ailleurs, la Banque islamique de développement (BID) a validé en septembre 2022 un financement de 37,87 millions dollars en faveur de la mise en œuvre du projet d’approvisionnement en eau potable de Kiffa. Ce financement intervient après le prêt de plus de 100 millions de dollars confirmé en juillet 2022 par le Fonds saoudien de développement (FSD). Le coût total du projet est évalué à 317 millions de dollars par le gouvernement mauritanien. Ce projet permettra d’assurer l’approvisionnement en eau potable pour 550 000 personnes jusqu’en 2035. Le projet d’eau potable de Kiffa sera mis en œuvre en plusieurs phases. De nouvelles installations capteront l’eau brute du fleuve Sénégal pour l’approvisionnement de la ville de Kiffa. Le cours d’eau traverse le pays avant de se jeter dans l’océan Atlantique, au Sénégal. Des canalisations transporteront l’eau brute jusqu’à une nouvelle station de traitement. L’eau potable sera ensuite stockée dans des réservoirs. Le projet comprend également un réseau d’eau de 250 km qui connectera 90 villages et desservira plus de 20 % de la population de la Mauritanie, soit plus de 550 000 personnes jusqu’en 2035. Ainsi, outre la l’amélioration de l’approvisionnement en eau potable, l’objectif est de minimiser les risques des maladies hydriques dans la ville de Kiffa et dans les localités environnantes. Les nouvelles installations seront construites dans le cadre du mécanisme de partage des eaux prévu par l’Organisation pour la mise en œuvre du fleuve Sénégal (OMVS). Le projet d’eau potable en cours à Kiffa favorisera également la création de 3 000 emplois dans le secteur de l’eau. En Septembre dernier, la Mauritanie et la France ont signé une convention pour le financement du projet d’accès à l’eau potable et à l’assainissement dans les wilayas des deux Hodhs, du Tagant et de l’Adrar. Ce projet, d’un financement de : 14 000 000 (quatorze millions d’euros), équivalent à : 520 000 000 (cinq cent vingt millions d’ouguiyas nouvelles), accordé par l’Agence Française de Développement (AFD), vise à améliorer les conditions de vie de la population dans ces quatre wilayas du pays. Quelques réalisations Comme nous avons déjà eu à le souligner, le secteur de l’eau et de l’assainissement occupe une place importante dans le Programme du Président de la République. Ainsi, à en croire les plus hautes autorités, l’alimentation en eau potable des populations sur tout le territoire national, a fait l’objet d’une attention particulière. Concernant l’accès à l’eau potable, le Gouvernement a réalisé selon les statistiques officielles au titre de l’année 2021162 forages d’exploitation, l’équipement de 198 points d’eau en matériel solaire, la réhabilitation et extension de 39 réseaux d’AEP, l’alimentation en eau potable de 14 localités du Hodh Echarghi ,la réalisation de 10.711 branchements particuliers dans les moughata d’Arafat, Riad et Sebkha et l’achèvement des travaux du projet d’alimentation en eau potable de Bouhdida. Par ailleurs, les travaux se poursuivent au niveau de plusieurs projets : entre autres l’alimentation en eau des villes d’Aioun et de Djiguenni où le taux d’avancement des travaux a atteint plus de 90%, le renforcement de l’AEP d’Atar à partir de Teyarett Sdar en haussant la production de 2400 m3 à 6000 m3 par jour, l’extension de la station de dessalement de Nouadhibou, l’installation de la station de traitement de l’eau à partir du fleuve à Boghé et l’alimentation de Oualata à partir de la nappe du Dhar. Et pour l’année 2022 il était prévu également le démarrage des travaux de l’alimentation en eau de la ville de Kiffa et des villages se trouvant sur le parcours, à partir du fleuve, de l’extension de la station de traitement et le raccordement de plus de 50 localités non desservies du projet de Dhar, de l’AEP de certains quartiers d’Arafat et de Riyad, de 90 réseaux d’AEP et l’achèvement des travaux de construction de 25 bassins de rétention au niveau des Wilayas du Hodh El Gharbi, de l’Assaba, du Gorgol, de l’Adrar, du Tagant, de l’Inchiri et du Tiris Zemmour, ainsi que le démarrage effectif des travaux de trois barrages. La Mauritanie en général mobilise 600 millions de mètres cube d’eau pour différents usages: agriculture, mines, alimentation en eau, etc. Il est important de noter que pratiquement les 3/4 sont destinés à l’agriculture. Concernant le prélèvement, la moitié de cette quantité vient du fleuve (abreuvage, agriculture, etc.) 1/4 des eaux sont souterraines et 1/4 sont des zones de barrages, comme celui de Voum El Gleïta. La Mauritanie possède à la fois des ressources en eaux souterraines et en eaux de surface. Elle dispose aussi d’unités de dessalement de l’eau de mer, qui peuvent aller jusqu’à 5000 m cube par jour. La ville de Nouakchott, qui s’alimente principalement de l’eau du fleuve et de la zone d’Idini, est présentement en attente de financement pour une unité de dessalement d’eau capable de prendre en charge 200.000 m cube par jour, ce qui serait révolutionnaire pour la ville. Mais en attendant la réalisation de tous ces ambitieux projets, l’accès à l’eau potable demeure encore aujourd’hui un véritable enjeu.

Bakari GUEYE

Source: Spécial HORIZONS/Novembre 2022